Evolus marche sur les plates-bandes d’ Allergan .

La biotech californienne a reçu l’accord de la FDA pour commercialiser une injection lissant la ride du lion.

C’est un feu vert qui fait trembler Allergan. Début février, la Food and Drug Administration (FDA), l’agence américaine des médicaments, a approuvé la mise sur le marché du Jeuveau, un produit rival du Botox pour lisser la ride du lion, située entre les sourcils. Produit par le sud-coréen Daewoong Pharmaceuticals, ce nouvel antirides est commercialisé aux Etats-Unis par la biotech californienne Evolus, qui compte le vendre dès ce printemps aux dermatologues.

Ce nouveau produit vient semer le trouble chez le groupe californien qui règne en maître sur le marché de la toxine botulique depuis trente ans. D’autant plus que la société fait face à la concurrence d’une autre entreprise californienne, Revance, qui s’est associée en février dernier au fabricant de génériques Mylan pour élaborer un biosimilaire du Botox.

  Clientèle de plus en plus jeune

Approuvé pour la première fois par la FDA en 1989 pour les spasmes musculaires autour des yeux, le Botox est autorisé pour un usage cosmétique depuis 2002 aux Etats-Unis. Après avoir séduit les femmes au-delà de la quarantaine, il convainc une clientèle de plus en plus jeune, accro aux selfies.

Allergan multiplie aussi les applications thérapeutiques : transpiration excessive, migraines, torticolis spasmodiques, incontinence… Résultat : le Botox pèse aujourd’hui près du quart des 15,8 milliards de dollars du chiffre d’affaires du groupe. Et ses ventes ont encore grossi de 12 % l’année dernière.

Le suisse Nestlé et l’allemand Merz ont réussi à se faire une place sur le marché avec d’autres neurotoxines (Dysport et Xeomin), mais Allergan possède toujours plus de 65 % de part de marché. Sa formule secrète, qui repose sur une toxine mortelle, est protégée par un dispositif de haute sécurité à son siège d’Irvine, dans la banlieue de Los Angeles. Pour éviter les soucis d’expiration de brevets, la société a opté pour un système de secret commercial.

20 à 25 % moins cher

Avec des études montrant des résultats presque aussi bons que le Botox et un prix 20 à 25 % moins cher, Evolus, qui a été co-fondé par un ancien dirigeant d’Allergan, pourrait transformer le paysage.

Certains analystes estiment cependant que la menace est limitée sur le marché cosmétique, car les clients aisés sont prêts à débourser plus pour une marque connue. L’injection n’étant pas remboursée, les organismes de santé ne peuvent pas non plus faire pression pour promouvoir une alternative moins chère.

Il n’empêche. Si des produits concurrents sont commercialisés pour des indications thérapeutiques, Allergan risque gros. Ces indications représentent les deux tiers des ventes de Botox. Et son utilisation pour la migraine est déjà menacée par le lancement d’une nouvelle classe de médicaments, les molécules CGRP, l’année dernière.

Tribu indienne

Allergan n’a donc pas hésité à sortir l’artillerie lourde : lundi, la société a déposé un recours auprès de l’International Trade Commission, une agence fédérale dotée de quasi-pouvoirs judiciaires, en accusant ses rivaux d’avoir volé certains de ses secrets de production.

Le groupe est connu pour défendre agressivement ses blockbusters, allant même jusqu’à recourir à des techniques peu orthodoxes. En septembre 2017, Allergan a ainsi payé 13,5 millions de dollars à une tribu indienne de l’Etat de New York pour utiliser le régime juridique spécifique dont bénéficie leur enclave. Elle leur a transféré une série de brevets liés aux gouttes pour les yeux Restasis, son deuxième produit le plus important, afin de les protéger de la concurrence.

Anaïs Moutot
Source: les Echos.fr