Comment les géants des cosmétiques réinventent leurs modèles commerciaux pour gagner en abonnements numériques.

« Nous essayons de suivre mais tout évolue si vite. Chaque jour est différent et tout change constamment », dit Jane Lauder, présidente de la marque de cosmétiques Clinique et petite-fille d’Estée Lauder, fondatrice d’Estée Lauder Companies, Inc.

Selon Lauder, les habitudes d’achat des jeunes clientes sont très différentes de celles des baby boomers et de la génération X.

« Ma génération [Gen X] et les plus âgés voient probablement une publicité, s’informent, vont dans un magasin et achète le produit. … Mais les habitudes d’achat des jeunes générations sont différentes. Elles font plus de recherches, elles sont armées d’informations et elles prennent les décisions seules, plutôt que de chercher des conseils au point de vente » dit-elle.

La jeune clientèle est plus influencée par leurs amies et les médias sociaux. Elle fait confiance aux personnes d’influence sur YouTube, ou aux soi-disant vloggers (blogueurs vidéo), dont la portée et l’influence est énorme.

Les clientes entre 18 et 34 ans représentent maintenant près de 29 pour cent du marché des produits de beauté, selon Karen Grant, une analyste de l’industrie mondiale des cosmétiques du Groupe NPD, une société d’études du marché.

« Il s’agit d’un segment démographique important et en croissance rapide que les grandes marques essaient encore de comprendre »  dit-elle.

«  L’un des grands défis aujourd’hui est qu’il y a tant de voix » dit Grant. « Dans le passé, les grandes marques étaient le porte-parole. Elles pouvaient se permettre d’être dans les magazines pour avoir plus de visibilité. Aujourd’hui, tout le monde peut être en ligne. Vous ne possédez donc plus l’espace. Vous ne pouvez pas attirer plus d’attention parce que vous êtes une grande marque. »

Les vedettes de YouTube

Les médias sociaux, en particulier YouTube, ont créé des centaines de célébrités de la beauté, y compris les vloggers Michelle Phan, Kandee Johnson et Bethany Mota, au cours des dernières années. Les leçons de maquillage de ces vloggers sont parmi les vidéos les plus courues dans la catégorie beauté sur YouTube et ont une influence directe sur les acheteurs.

Selon une enquête commandé par Variety et menée auprès de 1 500 adolescentes âgées de 13 à 18 ans, les vedettes de YouTube seraient plus populaires que les célébrités hollywoodiennes chez les adolescentes américaines.

De plus, certaines de ces vedettes des médias sociaux ont créé leurs propres marques de produits de beauté. Kylie Jenner, qui figurait parmi les 10 célébrités les plus suivies d’Instagram l’année dernière, a lancé sa propre ligne de cosmétiques en 2015.

Emboîter le pas au Nouveau Monde

Pour rivaliser avec ces jeunes vedettes, de grandes entreprises comme L’Oréal et Estée Lauder doivent regarder au-delà des médias traditionnels, tels que les magazines ou les publicités en plein air. Elles doivent s’adapter aux nouvelles tendances et maîtriser de nouvelles techniques pour maintenir leurs parts du marché.

« Quand on regarde les États-Unis et de nombreux marchés occidentaux, Facebook, YouTube et Google sont les principaux domaines qui attirent notre attention » dit Lauder.

Instagram, ainsi que Snapchat, sont également en croissance, dit-elle

Clinique, et d’autres grandes marques, ont réagi à la tendance YouTube en signant des accords ou en s’associant avec des vedettes numériques.

Selon Lauder, le contenu généré par l’utilisateur offre également une grande opportunité pour le marketing.

Jane Lauder, présidente de la marque international Clinique et petite-fille d’Estée Lauder. (Avec l’aimable autorisation d’Estée Lauder Companies Inc.)
« Nous nous efforçons d’encourager davantage le contenu généré par les utilisateurs. J’ai récemment fait une vidéo moi-même. C’est difficile, ce n’est pas si facile à faire. Nous encourageons donc les clients à soumettre des vidéos » dit-elle.

Les jeunes consommateurs recherchent constamment ce qui est nouveau et ce qui est différent, en sorte que les marques de niche peuvent être plus attrayantes pour eux, dit Grant.

En conséquence, les géants de la cosmétique transfèrent leurs médias traditionnels et leurs budgets publicitaires vers le numérique. Et pour éviter de perdre des parts du marché face à de nouvelles marques indépendantes, L’Oréal et Estée Lauder achètent de petites entreprises.

Fondée en 1946, la société cosmétique Estée Lauder possède aujourd’hui 29 marques dont Bobbi Brown, Clinique, Estée Lauder, MAC, Origins et Lab Series. La société a récemment ajouté les marques Too Faced et Becca à son portefeuille.

« Plus vous comprenez votre clientèle, mieux vous pourrez créer des produits qui sont attrayants. »
– Jane Lauder, présidente de la marque mondiale de Clinique

Depuis quelques années, les habitudes des jeunes consommatrices ont également déplacé l’accent des crèmes anti-âge vers le maquillage.

« Nous n’avons pas vu de croissance dans la catégorie des produits contre le vieillissement au cours des deux dernières années. Mais nous avons observé un boom énorme dans les produits de  maquillage et pour le teint » dit Grant.

Plus de 70 pour cent de la croissance des ventes de produits de beauté provient du maquillage et cette tendance est principalement attribuée aux jeunes consommatrices et aux personnes d’influence sur les médias sociaux, dit-elle.

L’efficacité du bouche-à-oreille

Estée Lauder, la légende des cosmétiques, était une vendeuse naturelle et experte en marketing. Aujourd’hui, de nombreuses stratégies de marketing que son entreprise utilise sont toujours en accord avec sa stratégie de vente et sa philosophie.

«  Selon ma grand-mère, ce qui a fait son succès était de comprendre ses clientes. … Elle passait beaucoup de temps dans les magasins à l’époque. C’est de cette façon que vous pouvez vraiment connaître vos clientes » dit Lauder.

« Plus vous comprendrez votre clientèle, plus vous serez en mesure de créer des produits attrayants » dit Jane Lauder.

Des décennies avant les médias sociaux, la grand-mère de Jane a cru dans l’efficacité du bouche-à-oreille. Elle savait que les femmes qui aimaient ses produits en parleraient. Son expression célèbre était « téléphone, télégraphe, dites-le à une femme.

Les médias sociaux ont aidé le bouche-à-oreille à retrouver son efficacité.

Selon Jane Lauder, le bouche-à-oreille est encore la forme la plus efficace de marketing, et sa société peut l’exploiter avec les médias sociaux.

Clinique, par exemple, a adopté une façon unique de partager les connaissances sur sa marque : Ses consultantes en  produits de beauté, qui travaillent au point de vente dans les magasins, travaillent aussi à promouvoir la marque sur les médias numériques et sociaux. Elles ont des vlogs et des blogs qui couvrent tous les aspects des soins de la peau et des conseils de beauté.

« Les activités peuvent changer, mais les pensées restent les mêmes » souligne Lauder.

Source : Epoch Times