A quelques jours du salon Cosmetic 360 qui accueillera onze entreprises néo-aquitaines emmenée par le pôle Cosmetic Valley, zoom sur PolymerExpert. Basée à Pessac, cette société innovante a trouvé dans le cosmétique biosourcé un relais de croissance aussi solide que bienvenu alors que son activité d’implant oculaire haut-de-gamme a été stoppée net par la crise Covid. Explications.
C’est ce qu’on appelle un faux départ ! Programmé pour 2020, le lancement commercial de la prometteuse société Innolens, filiale de PolymerExpert, n’a jamais eu lieu. Et pour cause, ses implants oculaires haut-de-gamme destinés au marché de la chirurgie ophtalmologique et du traitement de la cataracte ont trouvé portes clauses avec la pandémie qui a déstabilisé les hôpitaux et cliniques du monde entier.
« Concrètement, les chirurgiens de l’œil et les opérateurs n’ont pas ou peu travaillé pendant des mois et doivent aujourd’hui rattraper leur retard en privilégiant donc des produits standards qu’ils connaissent bien. Pour nous, ça se traduit par deux années blanches en 2020 et 2021, soit un coût supplémentaire de l’ordre de deux millions d’euros », lâche Marc Dolatkhani, le fondateur et dirigeant de PolymerExpert et Innolens.
Pour autant, pas question pour l’entrepreneur basé à Pessac (Gironde), qui a fabriqué et donné 10 tonnes de gel hydroalcoolique lors du 1er confinement, de se tourner vers l’Etat pour traverser cette zone de turbulences prolongées. « L’équipe de sept salariés était déjà là, on a donc décidé de recentrer nos activités sur la R&D sans recourir au chômage partiel ni au prêt garanti par l’Etat », précise-t-il. C’est donc l’abondante trésorerie de la maison mère PolymerExpert qui est venue au secours d’Innolens. Cette PME de 21 salariés, créée en 2005, pouvait se le permettre puisqu’elle affiche ces dernières années une croissance et une rentabilité particulièrement robustes. Le chiffre d’affaires 2021 devrait ainsi atteindre 5,3 millions d’euros contre 3,9 millions d’euros en 2020 et autant en 2019. Le résultat a quant à lui chuté en 2020 à +317.000 euros… contre +1,7 million d’euros un an plus tôt !
La cosmétique, nouvel eldorado
Si le marché des dispositifs médicaux reste toujours majoritaire dans l’activité de PolymerExpert, celui, plus récent, de la cosmétique affiche de solides promesses. Car les polymères, ces matériaux – gels, liquides ou solides – aux propriétés particulières sont très recherchées par les fabricants. « Nous avons eu un progression fulgurante avec un référencement de l’Estogel chez les grands donneurs d’ordres français et étrangers. Nous proposons l’Estogel biosourcé à 90 % depuis 2018 et nous lançons cet automne l’Estogel Green 100 % bio-sourcé, certifié Cosmos Ecocert et fabriqué en France », fait valoir Marc Dolatkhani. Un nouveau marché stratégique puisque les autres projets de diversification dans le secteur de l’aérospatial, présentés en 2019, sont aujourd’hui ralentis par la crise du secteur aérien.
L’Estogel de PolymerExpert est présent dans plus d’une vingtaine de produits cosmétiques commercialisés par les grandes marques du secteur (crédits : PolymerExpert).
Développé avec deux partenaires également basés à Pessac – le centre technique et industriel Iterg et le LCPO (laboratoire de chimie des polymères organiques) – l’Estogel est un gélifiant fabriqué à partir d’huile de ricin. Cette substance brevetée, que PolymerExpert est la seule à proposer sur le marché, permet de créer des gels microfluidiques pour les cosmétiques haut-de-gamme en encapsulant des actifs dans des micro-billes flottant dans la solution. Une capacité très prisée de la plupart des acteurs du cosmétique pour leurs gels, crèmes et autres parfums, particulièrement sur le lucratif marché chinois. L’Estogel représente entre 2 % et 3 % de la composition de ces produits cosmétiques et Marc Dolatkhani prévoit d’en écouler plus de 10 tonnes en 2021 puis 30 tonnes dès 2022… Des perspectives florissantes à condition que le recrutement du personnel permette de suivre la montée en cadence.
Une croissance menacée par la pénurie de main d’oeuvre
Car, comme dans un nombre croissant d’entreprises, le principal obstacle pour PolymerExpert c’est désormais la pénurie de main d’œuvre, qu’elle soit plus ou moins qualifiée.
« J’ai quatre postes à pourvoir immédiatement : un opérateur classique, un ingénieur-docteur en R&D, un technico-commercial et un poste de manutention. Mais aujourd’hui c’est devenu un très gros problème, un vrai frein. On refuse des commandes faute d’arriver à recruter ! », regrette le chef d’entreprise.
L’autre frein potentiel proviendra peut-être de la matière première avec une hausse de 30 % des prix de l’huile de ricin depuis le mois de juin 2021.
Mais, à l’instar de la startup bordelaise Dermoioniq spécialisée dans les soins à base de collagène d’eau douce, Marc Dolatkhani profitera du salon Cosmetic 360 pour séduire clients et futures recrues le 13 et 14 octobre prochains au Carrousel du Louvre à Paris. il sera entouré d’une dizaine d’entreprises de Nouvelle-Aquitaine dans le cadre de la délégation régionale menée par le pôle de compétitivité Cosmetic Valley. Au regard du potentiel du territoire, ce pôle a ouvert un bureau à Bordeaux dès 2018 piloté par Nathalie Simonin dans le cadre d’un partenariat avec la Région, ADI et Unitec. La délégation est composée de BioAlternatives, Cerevaa, Laboratoire Cosderma, Imasens, Kamax, Groupe Idea Tests, In SiliBio, Silab, Elysia Bioscience et Seprosys.
Source : La Tribune